FASHIONTECH ET DÉVELOPPEMENT DURABLE : UNE ASSOCIATION COMPATIBLE ?

ocean dress

© 2015 OceanTeam – Crédits Photos : Marc Lamey, Romain Dona

Lorsque les technologies s’invitent dans la mode on s’interroge forcément sur l’impact environnemental que cela va générer. Un certain nombre de créateurs associent la mode et la technologie. Impression 3D, textiles intelligents, incrustation de leds pour vêtements interactifs ou fibres optiques –  les exemples ne manquent pas. Sans compter que l’utilisation du numérique est indispensable pour faire les sites, blogs qui transmettent les informations aux communautés et clients, tout comme les plateformes collaboratives pour mettre les trouvailles en open source, co-créer, partager les vestiaires, louer, vendre, échanger, etc…. Il n’empêche que la technologie est souvent associée à l’utilisation de matériaux « sales » qui ne sont ni bio sourcés, ni recyclables. Pourtant les acteurs de cette mode sont très préoccupés par le développement durable et la protection de la planète.

Comment ces deux intérêts s’accordent-ils ?

Nous sommes allés à la rencontre d’Alice Gras cofondatrice de la Fashiontech [1] et fondatrice de Hall Couture[2] et pour lui poser la question et avoir son éclairage.

Sa réponse est limpide : « A quoi sert la technologie si elle n’aide pas à mieux vivre et mieux vivre c’est aussi évoluer dans un environnement dont on prend soin. On peut dire que c’est cet état d’esprit et cette sensibilité qui anime les créateurs de la Fashiontech. Il est tout à fait logique de vouloir que la technologie respecte aussi l’environnement et il est indispensable que les deux sujets se retrouvent sur un terrain d’entente. Il est préférable que les nouvelles technologiques soient en conformité avec notre biotope car la nature est notre première ressource ».

Il est vrai, poursuit-elle, qu’il n’est pas toujours évident de satisfaire les acteurs de la mode tech et ceux de la mode durable. Certains, qui travaillent avec les nouvelles technologies, sont très orienté business : mettre sur le marché des nouveaux produits qui répondent à des attentes et chercher à obtenir, à très court terme, le plus de gains possibles avec cela. Le potentiel est fort dans le domaine de la santé, du quantified self et du sport par exemple. Pour d’autres, qui ont avec une vision des choses différente, s’intéresser à l’avenir en général les conduit à se pencher sur les nouvelles technologies tout en étant attentif au futur de notre planète.  Pour ceux-là respecter l’environnement s’impose comme une contrainte qui permet de fait avancer les choses – et leur recherches – et de s’assurer un avenir plus heureux.

La technologie elle-même peut répondre à des problématiques d’ordre environnemental. Citons l‘exemple des chemises antitaches et anti-transpirantes (Le Lab[3]) qui nécessitent moins de lavages. Dans le procédé de fabrication, le fil et la façon de tisser font que la tache ne pénètre pas la fibre mais glisse dessus.

Une autre voie consiste à penser à la fin de vie du produit dès sa conception et à rechercher la meilleure façon de le recycler pour réduire l’impact écologique.

L’idée est bien de mettre la technologie au service d’une mode plus verte.

On peut aussi citer Ocean Dress[4] qui est un projet du Textilab[5] . Il s’agit d’une robe équipée d’un panneau solaire et de leds qui produisent de la lumière. Ceux-ci sont cousus sous la jupe, elle-même composée d’un filet de pêche sur lequel des sachets plastiques ont été tissés. Cela permet d’aborder le thème de la préservation des océans et du recyclage des déchets de façon poétique.

Concernant les composants électroniques, il y a des recherches de solutions moins polluantes. On commence à entendre parler de composants conçus de manière écologique sur la base d’une matière organique. Une lumière créée avec des bactéries est aussi à l’étude par l’une des startups occupante de la Paillasse[6] : Glowee . Ces projets demandent du temps mais témoignent d’une intention bien réelle et d’un processus engagé.

Pour Arielle Levy, cofondatrice du magasin de mode écoresponsable « L’herbe rouge » qui a accueilli lors des Journées Européennes des Métiers d’Art plusieurs jeunes créateurs dans sa boutique du Viaduc des Arts, la communauté de la Fashiontech crée des liens et partage des valeurs : celles d’une conception de la mode en phase avec les enjeux contemporains.

La mode de l’innovation est collective, elle fait travailler ensemble des chercheurs, des designers, des artisans, des informaticiens, etc ….qui veulent tous être dans une mode qui leur donne du sens et qui est en phase avec la société dans laquelle ils vivent.

Ainsi ils privilégient les circuits courts pour limiter les transports, l’éthique qui replace celui qui travaille au centre plutôt que l’actionnaire, l’économie circulaire et proposent de consommer moins mais mieux.

Par exemple, selon Claire Eliot, créatrice de mode et cofondatrice de la Fashiontech, si on a dans son armoire une robe dont on peut changer la couleur et se l’approprier en la transformant, il probable que nos actes d’achat seront moins fréquents.

Citons aussi l’initiative intéressante de Fashion Footprint qui à partir du flashage des QR codes apposé sur les étiquettes des vêtements donne accès à l’histoire de la fabrication du produit. Tudo Bom marque de mode éthique aujourd’hui en sommeil, était précurseur en la matière en imprimant sur ses étiquettes le nom de l’atelier de confection du vêtement. Le client retrouvait sur le site web photos et petits mots des couturières qui se trouvaient au Brésil.

Si l’innovation se fait aussi dans la recherche de solutions moins polluantes il est certain qu’un consommateur plus exigeant et aussi plus responsable accompagnera ce mouvement.

[1] La Fashiontech, association de loi 1901 a été créée dans le but de fédérer les acteurs de la mode et des nouvelles technologies dans une perspective de développement durable comme le développement des écosystèmes locaux. Elle compte 60 membres aujourd’hui.

 

[2] Hall Couture est un espace de travail partagé & concept store dédié à la création de mode innovante & responsable.

[3]Le Lab : une start-up qui fait entrer la mode masculine dans l’ère des nouvelles technologies

[4] http://oceanteam.wix.com/oceandress

[5] TEXTILab est un groupe de recherche et développement dans textile et habillement. Son ambition est de faire des séries de workshop pour amener les gens à une meilleure compréhension du vêtement innovant et ce que cela peut impliquer comme différents savoir-faire.

[6] La Paillasse, est un réseau de laboratoires interdisciplinaires offrant sans discrimination d’âge, de diplôme ou de revenu, le cadre technique, juridique et éthique nécessaire à la mise en œuvre de projets collaboratifs et open-source.

 

Rencontre avec un artiste pas ordinaire

10432555_10205266042074321_7184812810795150423_n

Il y a des vocations qui ne se contrarient pas !  Claudio Soro, originaire d’Argentine, a écouté son dessein et s’est attelé à la tâche. Il est un artiste au sens complet du terme, créatif, autodidacte et pluridisciplinaire, puisant dans chaque expérience créative l’énergie pour avancer vers la suivante. Il est de ceux dont l’élan créatif est vital.

En arrivant en France il y a 20 ans, il met un panneau à la fenêtre de son appartement « Retouches et confection de costumes pour le théâtre » et commence à travailler. Il a fait d’un besoin son métier. Lorsqu’il était comédien, sa première passion, il a avec l’aide de sa maman couturière, créé ses tenues de scène. Puis, de fil en aiguille, flairant le talent, des troupes de théâtre, lui ont demandé de créer les leurs.

Pour CLaudio, faire l’habit était une prolongation de son travail de mime. Le costume, se jouant de l’effet visuel, peut transformer un corps et le mettre au service du personnage incarné par le comédien. Puis est arrivé le moment où la décision de sortir de la lumière de la scène pour se consacrer au métier de costumier s’est imposée et depuis Claudio explore son art et l’exerce dans plusieurs domaines comme la danse, les marionnettes ou les arts du cirque.

Aujourd’hui, tout en continuant ses réalisations personnelles, il est intégré dans l’équipe d’un grand cabaret parisien et a pour mission de maintenir en bon état les tenues des danseurs et danseuses. Il répare, réajuste, consolide, raccommode les costumes pour que chaque soir sur scène la magie opère devant des spectateurs qui n’imaginent pas le nombre de petits points patiemment tirés, discrets mais solides. Dans ces métiers, tout comme le brin de folie, la patience est une vertu nécessaire au processus créatif.

La technique a aussi son importance. Comme dans la mode, il y a un designer puis un « lecteur du dessin » qui prend les décisions du volume. Souvent, il va voir le ferrier pour commander les carcasses qui vont se glisser sous les jupes et leur donner du volume ou encore le plumassier pour les coiffes et autres ornements. Les costumes doivent s’adapter aux mouvements du danseur. S’ils ne sont pas confortables, c’est pour contraindre aussi la façon de bouger de celui qui le porte. Mais pour le cabaret la fonctionnalité et le rendu priment.

La technique doit être au service des nécessités et on peut faire de 100 façons différentes. Pour l’ourlet par exemple, au théâtre on se sert beaucoup du point chausson qui permet aux deux épaisseurs de tissu de bouger sans craquer le fil, mais le point arrière peut aussi être utilisé. Ce qui est important est de faire de façon à ce que le résultat convienne et que cela soit beau. Et puis il faut connaître l’usage qui va être fait du vêtement. Lorsque le costume est éphémère, c’est l’inventivité qui compte et pas la technique. Si c’est pour un danseur de cabaret, il doit être fonctionnel et solide pour durer le temps de la revue mais aussi original pour ne pas copier des choses qui existent déjà. Bref, c’est comme un cocktail ou une formule, on mixte plusieurs ingrédients. Pour Claudio pouvoir observer les toilettes du cabaret reste toujours une émotion.

Gare à celui qui va lui dire que la mode n’est que frivolité ! Il s’indigne et cite l’exemple de la femme qui a libéré son corps du corset, des robes qui se sont raccourcies et des décolletés qui se sont approfondis marquant la féminité. Le fait que la mode ne soit pas anodine est aussi ce qu’il transmet aux jeunes qui, passant dans son atelier, apprennent à prendre le temps qu’il faut pour savoir coudre.Au rythme de l’aiguille l’ouvrage avance et celui qui opère reste concentré et médite.
En accord avec l’artiste japonaise Rieko Koga, Claudio dit que coudre est aussi un acte spirituel.

Puis d’un saut, son esprit vagabonde ailleurs et il se met à disserter sur la notion de beau. Qu’est-ce qui est beau ? Que veut dire beau ? élégant, de bon goût, esthétique, fin ? Est-ce que ce qui étrange est beau ? Il nous arrive de trouver qu’un vêtement n’est pas beau mais qu’il est intéressant. Dans ce cas on porte un autre regard sur le vêtement et ce qui est beau c’est la démarche du créateur, le développement de la matière, la recherche de nouvelles formes et de nouvelles lignes.

La dimension humaine des métiers d’art

(Crédit image : Pauline de Chassey)

(Crédit image : Pauline de Chassey)

Le début du mois d’avril a été riche en événements pour les acteurs des métiers d’art.

« L’empreinte du geste » a ouvert les festivités avec une exposition au musée des Arts Décoratifs, une série de conférences et la projection de l’excellent film « The heart of glass » de Jérome de Gerlache sur le parcours de l’artiste verrier Jérémy Maxwell Wintrebert.

Puis les Journées Européennes des Métiers d’art ont permis les visites des ateliers et la rencontre avec les artistes et enfin le Festival International du Film des Métiers d’Art a projeté une sélection de documentaires sur le sujet.

L’occasion de s’interroger sur le rôle social de ces métiers et de ceux qui les exercent.

Pourquoi sont-ils créateurs de lien ? Quelle est leur dimension humaine ?

En France, selon les Ateliers d’Art de France, le secteur des métiers d’art se matérialise par près de 38 000 entreprises qui emploient plus de 60 000 personnesCe n’est pas rien.

Le lien à travers la matière, l’objet et l’intention de son créateur.

La rencontre se fait également dans l’échange autour de l’objet.

La sensibilité de l’artiste se transmet dans le travail de l’objet et un lien se crée entre le créateur, l’acheteur et l’utilisateur.

L’histoire que raconte le créateur à travers l’objet peut entrer en résonance avec sa propre histoire et sa propre humanité comme si les intentions de l’artiste s’étaient « imprimé » dans sa création.

Ainsi l’objet qu’ils ont en commun, rappelant des émotions, va unir l’artiste et celui qui reçoit l’objet.
Selon Manon Clouzeau, céramiste, « la beauté est une porte ouverte directe vers le cœur et cela passe même si l’acquéreur ne rencontre pas directement le créateur, il voit son empreinte. Cela peut passer par l’éveil sensoriel que produisent la forme, la texture et la couleur de l’objet ».

Emmanuelle Manche, également céramiste l’exprime ainsi : « je transmets à travers les objets que je crée une partie de mon univers ».

Les artisans d’art ont cette habileté à transmettre dans leurs créations ce qui les habite.

On comprend alors pourquoi une production en série fait perdre du sens et pourquoi les artistes ont tant à cœur de sensibiliser à la valeur de l’ouvrage, au temps passé.

Le lien par la transmission des gestes et métiers

Il y a la transmission directe entre un maître artisan et son élève qui se passe au sein des ateliers et qui concerne le savoir-faire et le savoir-être.

Cet apprentissage est une rencontre humaine faite de dialogues, les gestes montrent et les mots définissent et expliquent, et ce faisant celui qui transmet continue à apprendre autant que celui qui reçoit.

Les autres sens étant fortement sollicités dans tous les processus de création tout ne passe pas par la parole. Comment transmet-on le sensible ? L’atmosphère si particulière des ateliers, où flottent sensibilité, recherches et questionnements en témoigne.

Celui qui transmet et qui a aussi en son temps été élève lègue plus que sa propre expérience, il devient le passeur d’une histoire beaucoup plus ancienne, celle de l’humanité qui se perpétue à travers lui.

Le lien avec le passage de l’histoire et des traditions

Lorsque les techniques ancestrales perdurent car elles sont correctement conservées, ce sont des traditions qui se transmettent. Celles d’une région, d’une culture ou de coutumes qui se symbolisent par des broderies sur un tablier, les dessins d’un vitrail, la forme des sculptures, la matière des bijoux etc….

Les métiers d’art font le lien entre le passé et le futur chaque fois qu’une technique traditionnelle est utilisée de façon innovante ou réinventée car elle est source d’inspiration.

Ainsi le passé emmène ces métiers de tradition dans le futur.

Le film primé au FIFMA, « Génération Y à l’heure du thé » de la réalisatrice Pauline de Chassey en est une parfaite illustration.

Une classe de design de l’Ecole des Arts Déco de Paris, accompagnée par son professeur va créer des objets en porcelaine avec une des plus anciennes manufactures de la ville de Limoges, Haviland. Comment maintenir les exigences de son expression artistique tout en appréhendant les contraintes d’une technique ?

Comment la rencontre entre ces deux univers va-t-elle se faire ?

Le documentaire retrace le processus fait de questionnements, de doutes, de freins, de déceptions et des émerveillements de part et d’autre jusqu’à la naissance l’objet fruit de toutes les intentions et attentions portées ensemble.

« Faire des choses qui vont s’adresser à la part lumineuse de l’être humain » dit le professeur. « Créer des objets, c’est faire le lien entre une personne et une autre et puis on se rend compte qu’il y a des savoir-faire et des gens qui ont des mains en or » dit l’élève.

Relier la matière et l’esprit est sans aucun doute une façon de transcrire son intériorité.

Cet article est aussi disponible sur L’agence de presse Internationale PRESSENZA : http://www.pressenza.com/fr/2016/04/dimension-humaine-metiers-dart/

 

Le musée de l’éventail en quête d’un nouveau lieu

thumb_IMG_2107_1024Juste avant la fermeture des portes du musée de l’éventail et espérons le, sa réouverture prochaine, nous avons rencontré Anne Hoguet, qui représente la quatrième génération d’une famille qui perpétue l‘art de la fabrication d’éventails. 

L’histoire de cette entreprise familiale remonte à la fin du 19ème siècle et a pour cadre la commune de Sainte Geneviève dans l’Oise. Joseph Hoguet ouvre un atelier de montures d’éventails. C’est ce que l’on appelle la tabletterie.

Lui succèdera son fils Marius lui-même suivi de son fils Hervé, le père d’Anne Hoguet.

En 1960, ce dernier rachète – avec l’objectif d’avoir l’activité complète – une entreprise qui fabrique la feuille, laquelle habille la monture de l’éventail. Celle-ci s’installera 2 boulevard de Strasbourg dans le 10ème arrondissement de Paris et y restera jusqu’à aujourd’hui.

Le lieu, unique en son genre, est le dernier qui abrite un des métiers rappelant le Paris de la Belle Epoque et ses music-halls. Il fut un temps où toutes les activités liées au théâtre et à la mode étaient dans ce quartier. Il était fréquent d’y croiser des éventaillistes, mais aussi des perruquiers, des plumassiers, les chapeliers.

Le musée est ouvert en 1993, pour protéger l’activité menacée de disparition, l’éventail, paravent de la pudeur, étant devenu désuet. Une de ses salles est classée monument historique gage du sérieux de cette préservation. Cela implique pour son déménagement, même si pour le moment le nouveau lieu reste inconnu, de démonter et mettre à l’abri les meubles, les boiseries, les tentures murales au décor de fleurs de lys.

La particularité est d’avoir dans le même lieu le musée et l’atelier. Le musée abrite les archives produits, les dessins, les outils et toute l’histoire de l’entreprise. L’atelier répond à des commandes de restauration et de création pour les maisons de haute couture, l’opéra, le théâtre et le cinéma.

La tabletterie reste produite dans les ateliers de l’Oise jusqu’à leur fermeture en 1994 en raison des machines outils qui prenaient de la place, étaient bruyantes et produisaient de la poussière.

Les matières employées pour les montures sont extrêmement variées comme les différentes nacres, la burgau, l’écaille de tortue, l’os, la corne et les bois précieux.  Le travail consistait à façonner cette matière pour produire la forme, la sculpter, l‘ajourer ou encore y incruster de l’or.

Pour l’habillage on utilise des tissus comme la soie, l’organza, le dentelle et bien sûr la plume. La peau est aussi employée tout comme le papier même si celui-ci donne un résultat plus commun.

Restaurer ou produire un éventail nécessite quelques qualités et aptitudes comme la patience et la minutie. Les mains doivent être habilles et le geste adroit pour respecter la matière. Il est préférable d’avoir fait une école d’art appliqué pour apprendre et comprendre la matière mais aussi le dessin pour être en capacité de réaliser une esquisse précise et réaliste d’un projet.

Pour notre hôtesse, dernière maîtresse des lieux, la question de la vocation ne s’est pas vraiment posée. Lorsqu’elle a eu 14 ans, Anne Hoguet a tout simplement été emmenée dans l’histoire familiale et a fort heureusement a développé le goût pour le métier et la création. Au décès de son père, elle choisit d’assumer la responsabilité de perpétuer ce métier rare.

Ses nombreuses connaissances ont été récompensées par sa nomination en 1994 en tant que Maître d’Art par le Ministère de la Culture et son entreprise reçoit en 2006 le label Entreprise du Patrimoine Vivant.

Aujourd’hui, elle a toujours le souhait de faire perdurer l’activité avec une réouverture dans un lieu où elle pourrait se dédier à son art d’éventailliste et à transmettre son savoir-faire. Tout en étant dans un même lieu pour maintenir le lien entre l’activité et son histoire qui existe de fait, le musée pourrait être délégué en vue de se développer à la hauteur du trésor qu’il détient.

Vous vous en doutez, le moment qu’elle vit est à l’image de ses éventails, délicat.

Aussi, si vous souhaitez lui faire un parvenir un mot d’encouragement, je me ferais le messager pour  lui communiquer une compilation de vos soutiens.

Marie-Laurence Sapin – mlsapin.fr – marielaurencesapin@gmail.com

Quel bénéfice pour le client d’une entreprise de savoir que celle-ci a des archives organisées ?

échantillons tissusarchives robes

Il y a quelques temps au cours de mes démarches pour faire connaître mon offre de service, j’ai contacté un fabricant de tissu.

Son dirigeant a écouté mon argumentaire sur la nécessité de préserver et de capitaliser son patrimoine – des tissages dans son cas – et m’a demandé ce que cela allait apporter à son client.

Cette excellente question mérite que l’on s’y arrête.

Avoir des archives organisées permet de gagner du temps de réponse.

L’entreprise est en capacité de proposer à son client une réponse rapide, organisée et multiple (images, caractéristiques techniques, options de couleurs, etc.).

 

Avoir des archives organisées est un gage de sérieux.

Une entreprise qui a la mémoire de ses techniques de tissage, qui l’enrichit et peut partager ce savoir-faire avec ses clients, rassure. Elle est aussi capable de reproduire, de transformer et d’améliorer ses tissages en exploitant son passé.

 

Avoir des archives organisées est un service en plus.

Conserver les dessins de ses clients pour pouvoir faire une recherche d’antériorité est un service supplémentaire.

Chaque client pourra venir plonger dans ses anciennes créations et s’en inspirer pour en créer de nouvelles.

La mode s’engage pour le climat

Défilé la mode s'engage pour le climatphotographies ©Luc Valigny ©Guillaume Landry ©Pablo Grand Mourcel

Le colloque “Changer la mode pour le climat : comment réduire l’impact environnemental de la Mode ?”, organisé par Universal Love[1] s’est déroulé en 3 temps : une journée d’interventions avec des tables rondes, un défilé et une soirée autour de la projection du film réalisé pendant les journées de travail, prétexte à favoriser les rencontres, liens et échanges entre les acteurs concernés par le sujet.

La mode avec son image de superficialité, ses directeurs artistiques starifiés est souvent dans l’imaginaire collectif symbolisé par le luxe inaccessible porté par les people, allant de soirées en défilés et posant pour les magazines.

Ou a contrario, et ce n’est guère plus gratifiant, la mode est une des industries les plus polluantes au monde (teintures, transports, entretien…), très énergivore en matières premières et peu respectueuse des droits humains dans plusieurs de pays.

Mais la mode c’est aussi, des manufactures, des emplois, des savoir-faire parfois proches de la virtuosité, des nouveaux créateurs qui rêvent de mettre leurs inspirations dans le monde. Et les acteurs du secteur, soucieux de la santé de notre planète et de ses habitants, sont en réflexion constante pour que la filière s’engage pour la protection de l’environnement.

Un programme jalonné de questionnements, d’échanges et de réponses avec une grande diversité thématique. Savoir biosourcer et éco-concevoir, revaloriser le produit en fin de cycle, diminuer les impacts des procédés polluants, allier créativité et contraintes environnementales et sociales, la fonction des chartes et des labels, les enjeux de la relocalisation de la production, transformer nos déchets en ressources, savoir calculer l’impact du choix de sourcing, etc….

Les solutions, s’appuyant dans certains cas sur des innovations technologiques et  les bonnes pratiques, ont été évoquées pour toutes les étapes du cycle de production.

Le défilé haut en couleur vitrine de tous les possibles, ultime démonstration qu’un vêtement éthique et écologique est aussi à la mode.

Et enfin une Charte d’engagement de la Mode pour le Climat a été signée par les principaux acteurs du secteur et la Ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Ségolène Royal.

Pour écouter ce qui a été dit au cours des tables rondes et regarder le défilé, rendez-vous sur le site web : http://changerlamodepourleclimat.fr.

photographies ©Luc Valigny ©Guillaume Landry ©Pablo Grand Mourcel

[1] http://www.universallove.fr/association.htmlUniversal Love est une association qui défend depuis 1995 une création qui a du cœur et qui promeut la mode éthique.

 

LE GANT SOUS TOUTES SES COUTURES

Tableaux de mesures et tailles des gants

La ganterie fait partie de ces savoir-faire précieux qui, malgré les difficultés rencontrées, traversent les siècles en perpétuant la tradition.Trois régions en France continuent à faire vivre ce patrimoine, la région de Grenoble en Isère, celle de Saint-Junien en Haute-Vienne et celle de Millau dans l’Aveyron.

L’histoire du gant est ancienne. Nous en avons pour preuve un gant d’archer – en cuir tressé – retrouvé dans la tombe de Toutankhamon. Bien avant cela, des peintures rupestres, datant du paléolithique supérieur et représentant des formes de protection de la main ont été découvertes dans une grotte près de Marseille[1].

La nécessité de protéger sa main, les usages et les élégances, ont fait du gant, au fil des époques, un objet utilitaire, de bienséance, de coutumes et de mode.

Certaines expressions imagées perdurent telles des témoins de sa place au sein de la société : aller comme un gant, souple comme un gant, jeter ou ramasser le gant, une main de fer dans un gant de velours, etc.

Le musée de la ganterie Jouvin à Grenoble

Entrer dans le musée c’est s’apprêter à découvrir quelques merveilles et à écouter une histoire.

– Celle d’un lieu, une salle capitulaire du 16 ème siècle car à son origine l’immeuble était un prieuré rattaché à l’église Saint-Laurent.

– Celle d’une famille – les Jouvin – avec Xavier, un gantier féru d’innovation qui va dès 1834 révolutionner le métier.

Le gardien du trésor n’est autre que son arrière, arrière-petit-fils, qui raconte aux visiteurs, l’histoire de cette famille, parfois tumultueuse comme peuvent l’être les eaux de l’Isère descendues des montagnes.

Xavier Jouvin a monté sa première entreprise, “ les gants Jouvin” en 1839 avec son demi-frère. En 1843, un associé supplémentaire apportant des capitaux est arrivé et l’entreprise a commencé à augmenter son chiffre d’affaires.

Xavier Jouvin est mort très peu de temps après, en 1844, mais la société qui avait la propriété des brevets a continué son chemin sous le nom “Jouvin et compagnie”.

Son épouse, héritière des brevets, l’a quittée mais continuait à couper des gants exclusivement pour son beau-frère.

En 1849, les brevets sont tombés dans le domaine public et les deux associés ont mis Madame Jouvin à l’écart puisqu’ils pouvaient, à partir de cette date, utiliser la technique librement.

La veuve Jouvin, qui s’est alors retrouvée avec un immeuble, des coupeurs mais plus de débouchés, a créé sa propre ganterie : Veuve Xavier Jouvin et Compagnie. Son beau-frère a eu beau lui intenter des procès pour l’empêcher de le concurrencer, elle les a gagnés et a conservé la marque.

Ainsi en 1849, cette ganterie fabriquait 44 000 douzaines de paires de gants par an sur les 250 000 douzaines fabriquées à Grenoble.

100 personnes étaient employées dans l’atelier Jouvin et plus de 1000 “couseuses” travaillaient à la pièce chez elles.

L’âge d’or de la ganterie Grenobloise

 Entre 1850 et 1870 le chiffre d’affaires de la production de gants à Grenoble passe de 9 à 30 millions de francs et le nombre d’entreprises de ganterie de 75 à 175. Elles réalisent le tiers de la production française.

En conséquence la population de la ville, qui vit de cette activité et de ses annexes comme la teinturerie et la megisserie passe de 27000 à 40000 habitants dont un grand nombre d’ouvriers dédiés cette industrie manuelle.

Sur tous les gants de Grenoble, on trouvait l’indication “Coupe Jouvin” car même ceux qui n’étaient pas de la marque revendiquaient le procédé.

La renommée du gant de Grenoble arrive jusqu’au couple impérial (Napoléon III et Eugénie de Montijo) avec la remise en 1860, par quatre jeunes filles dont Rose Jouvin – fille de Xavier Jouvin – de deux corbeilles de 25 paires de gants. Quatre cinquièmes de la production sort des frontières françaises pour s’exporter Angleterre et aux Etats-Unis.

Aux mêmes dates, la maison Jouvin a deux magasins à Paris, un à Londres et un autre à New York.

A partir de 1880, la société Perrin – une autre grosse ganterie de Grenoble – introduit les premières machines à coudre. Le temps de fabrication d’une paire de gants s’accélère et divise par deux le nombre des “couseuses”.

Deux brevets sont à l’actif de Xavier Jouvin

 Xavier Jouvin a tout d’abord inventé la notion de pointure.

Avant cela, pour fabriquer une paire de gants on posait sa main sur la matière et on tournait autour.

Xavier a commencé par une observation anatomique de mains des patients à l’hôpital de Grenoble.

La prise de leurs mesures a amené à normaliser les tailles : 320 exactement, répertoriées sous la forme d’un tableau breveté en 1834. Auxquelles s’ajoutent des catégories qui représentent le volume : petite main, effilée, grande, large.

Pour trouver sa taille, rien de plus simple, on mesurait le tour de sa main au niveau de la paume et en reportant la mesure sur le tableau on trouvait le calibre qu’il fallait utiliser pour couper le gant.

Tant que le sur-mesure a existé, soit jusqu’à la fin du 19ème siècle, ce système a été utilisé.

Puis avec l’apparition des grands magasins et la vente de gants déjà fabriqués, le nombre de tailles a été réduit.

Le second brevet de 1836 est celui de “la main de fer” utilisée pour couper le cuir. Un étavillon (rectangle de peau) est posé sur cette main de fer et l’artisan tournait autour avec un tranchet pour couper le cuir.

Dès 1838, ce système a été amélioré par une plaque répulsive : tous les doigts sont entourés d’une lame de rasoir ce qui en fait un emporte-pièces. On place le tout sous presse et cela coupe plusieurs peaux en une seule fois.

Connaître la matière pour la travailler

Chez Jouvin et à Grenoble seule la peau de chevreau était utilisée en raison de sa finesse et de sa résistance. Le chevreau élevé en région Dauphinoise, dont les peaux étaient achetées après mégisserie, étaient triées en fonction de leur souplesse et de la finesse de leur grain, puis teintes.

Le “prétant”[2] – 15 % en longueur et de 45% en largeur – détermine le nombre de gants qui pourront être coupés, soit quatre par animal maximum.

Les peaux sont minutieusement inspectées au moment de la coupe pour placer les défauts au niveau des coutures ou des entre-doigts ou fourchettes si on emploie le vrai mot du métier.

Des machines-outils plus un sacré tour de main

Plusieurs machines sont utilisées pour la fabrication des gants.

La “main de fer” bien entendu, les presses manuelles puis électriques – celles de Raymond Bouton Grenoblois qui a inventé le bouton pression – et les machines à coudre et les mains chaudes.

L’étape de la couture demande minutie et finesse que ce soit pour la couture surjet – peaux bord à bord maintenues par un point zigzag -, ou le piqué anglais qui superpose les deux peaux et les pique ensemble. Dans ce cas, la tranche de la peau restée apparente était teinte.

Avant le montage, on pouvait broder le gant pour lui apporter une fantaisie, avec par exemple, le point de Beauvais.

Une bonne ouvrière “sortait” 30 paires de gants par jour.

Et enfin, on glisse le gant sur la main chaude pour le lisser.

Marie-Laurence Sapin

 

 

 

Bienvenue au Kiosque

IMG_1296IMG_678711110520_647703062027176_7697894136534171589_n12651224_751096261687855_7766830380749363919_n

Traditionnellement un kiosque est une petite boutique qui vend des journaux ou un édicule dans un jardin servant d’abri aux joueurs de musique les soirs d’été.

Celui-ci abritera mes vagabondages autour des savoir-faire. Vous y trouverez des articles, des partages, des contributions, des nouvelles, des coups de cœur, des choses vues, lues ou entendues et surtout des rencontres.

Il sera aussi une trace du périple qu’est la création d’une activité autour de la préservation, valorisation et transmission des savoir-faire.

Le kiosque pourra aussi recevoir des contributions extérieures sur des thématiques similaires ou proches. N’hésitez pas à me communiquer vos propositions.

Marie-Laurence

 

 

 

 

 

MON OFFRE

ARCHIVES ET CONSERVATION DU PATRIMOINE VIVANT

Transformer les savoir-faire de l’entreprise en valeur ajoutée.

  • Rechercher et ordonner les documents relatifs à l’histoire et aux savoir-faire de l’entreprise.
  • Les répertorier et obtenir une vision complète des archives. Cette évaluation permettra de décider des actions de valorisation.
  • Les sécuriser pour éviter leur dispersion et leur perte.
  • Les mettre à la disposition des différents acteurs de votre entreprise pour un usage immédiat.
  • Des stylistes, pour stimuler la création en s’inspirant du passé.
  • Du service marketing pour réfléchir sur le territoire de marque visant et s’ouvrir de nouveaux marchés.
  • Du service relations publiques et presse pour leurs outils de communication.
  • Du service relations humaines pour le contenu des formations et partager avec les salariés la culture de l’entreprise.

– Effectuer des recherches documentaires et des enquêtes terrain pour retrouver des documents manquants et apporter un complément d’informations sur l’histoire de l’entreprise.

– Archiver la mémoire orale pour conserver l’historique des savoir-faire en recueillant la parole de ceux qui les ont exercé.

Chaque mission se conclut par un rapport comprenant une synthèse de l’audit, une analyse swot, des propositions d’actions de valorisation du patrimoine.

PRÉSERVATION ET TRANSMISSION DES SAVOIR-FAIRE

Sécuriser les métiers en voie de disparition, anticiper leur transmission, et favoriser la collaboration entre les détenteurs de savoir-faire traditionnels et les nouveaux créateurs.

Réaliser des enquêtes terrain pour identifier les besoins, motivations et contraintes concernant la préservation et la transmission des savoir-faire.

Identifier les savoir-faire à préserver prioritairement, les postes de travail et les métiers que cela concerne.

– Décrire les processus techniques des savoir-faire à l’aide de différents outils (écriture, schémas visuels, photo, vidéo) pour :

  • – les conserver,
  • – les transmettre aux apprentis et élèves,
  • – les mettre à la disposition de nouveaux créateurs, designers, stylistes, etc…,
  • – mettre en valeur le travail des gestes dans les outils de communication.

VALORISATION ET COMMUNICATION

Promouvoir les savoir-faire, valoriser le travail des artisans en leur donnant la parole, renforcer l’attractivité des métiers pour susciter de nouvelles vocations.

Augmenter en visibilité

  • Réalisations vidéo : vidéo-métier *, vidéo promotionnelle ou vidéo reportage.
  • Aménagement de parcours de visite d’ateliers à destination d’amateurs curieux.
  • Organisation de work-shop collaboratifs.
  • Communication éditoriale :
    • Interne : articles pour journaux d’entreprise.
    • Externe : communiqués de presse, plaquettes, site web ou blog.

* Caroline de Tugny, artiste brodeuse : https://vimeo.com/home/myvideos

Média training

  • Préparation à la prise de parole en public et à la technique d’interview.
  • Accompagnement à la construction du discours pour rendre accessible un métier technique à un public non spécialisé.

Vous êtes un centre de formation ou un jeune créateur ?

Vous êtes un centre de formation et vous voulez renforcer l’attractivité des métiers de la mode et du textile pour susciter de nouvelles vocations.

Pour cela il est possible de faire des campagnes de sensibilisation auprès des jeunes générations par :

  • Vidéos métiers.
  • Visites d’ateliers avec expérimentation concrète.
  • Interventions des artisans dans les écoles.
  • Communication sur les possibilités de carrières.

Vous êtes jeune créateur de mode et votre budget ne vous permet pas de rémunérer un/une modéliste expérimenté.

Je vous conseille sur les retouches à effectuer :

  • En vous accompagnant au moment de l’essayage du prototype tissu sur mannequin vivant .
  • En révisant avec vous le volume de votre vêtement pour qu’il corresponde à ce que vous avez imaginé et dessiné.
  • En contrôlant le bien aller de votre vêtement en fonction de la réaction matière.
  • En vous expliquant comment procéder pour faire les retouches sur le patronage.